mercredi 26 septembre 2012

♫ Trempez-la dans l'huile, trempez-là dans l'eau, ça fera un escargot tout chaud ♫

Je viens de prendre conscience que c’est la rentrée. Faut dire aussi que je n’ai pas tellement pris conscience que c’était les vacances (même si je fais partie de cette clique de privilégiés qui se payent le luxe de partir, pas forcément loin de chez eux, mais au moins ailleurs et longtemps).


De façon classique ça a commencé dans un train, mademoiselle A sur mes genoux, côté couloir ; côté fenêtre une dame âgée accompagnée de son chien Furoncle. Aux alentours de longtemps avant d’arriver, mademoiselle A s’est mise à vomir sans préavis (la gerbe sans signe extérieur apparent de malaise est une des caractéristiques des enfants de son âge qui ne laisse pas de m’étonner). Impression soudaine que des litres de liquide malodorant se répandent en cascade dans le wagon. Mais c’est pas qu’une impression dis donc.  La maîtresse de Furoncle, que jusqu’alors je trouvais sympathique car elle ne se formalisait nullement que mademoiselle A, prise d’enthousiasme juvénile et de curiosité débordante pour son environnement, lui envoyât parfois de bons coups de pieds dans les cuisses, la maîtresse de Furoncle n’aurait pas dû dire Il ne faut pas trop nourrir les enfants avant un voyage, ça ne m’a pas aidé. Je veux dire dans ces cas-là, le mieux, à défaut de participer au nettoyage, c’est de fermer sa gueule.

Nous nous sommes finalement installées dans le sas, devant la porte des chiottes, mademoiselle A nouvellement équipée de linge frais et confortable (pas forcément coordonné parce que pioché à l’aveuglette dans la valise), l’estomac bien purgé  et toute joyeuse de voyager dans sa poussette, et moi, le pantalon raidi des fluides corporels parfumés de mon bébé d’amour qu’il est trop mignon tout plein mais putain de merde tu fais vraiment vraiment chier là, surtout que tu as poussé l’élégance, la putain de ta race maudite, jusqu’à m’en mettre entre les doigts de pieds qu’habillent une paire de sandales qui vaut une fortune, t’as intérêt à ce que ça se nettoie bien bordel.

Voilà, c’est à peu près là que la tentation de l’exfiltration m’a saisie.
Et c’était que le début.

Le soir mademoiselle A fut mise à la diète, selon le principe du Dans le doute, abstiens-toi (plus un peu de vengeance personnelle, évidemment, tiens ça te fera les pieds, les miens c’est déjà fait merci), ce qu’elle me fit payer, tu t’en doutes, en passant le restant des vacances, à savoir la totalité donc si tu suis, à se précipiter sur le moindre élément d’apparence comestible en geignant de façon fort convaincante et convaincue À man-yer…à man-yer…avec ce petit accent roumain qui n’aurait pas dénoté dans une rame de métro. Et là, dans le même esprit que pour  la maîtresse de Furoncle, je ne saurais trop de te conseiller d’éviter les réflexions du type Eh ben alors ! tu ne la nourris pas cette enfant ! (rires) ou encore Il vaut mieux ça que le contraire, qui certes n’ont rien d’agressif ou de dérangeant en soi mais qui, comment dire, lassent oui c’est ça lassent mortellement à force, un peu comme le leitmotiv affamé de la chair de ma chair (mange ta main et garde l’autre pour demain, disait mon grand-père ce grand sage). Par exemple après une nuit entière de séparation au cours de laquelle elle n’avait pas vu sa chère mère (alias sa raison de vivre, son centre du monde), Mademoiselle A ne disait pas Bonjour maman chérie mais bien plutôt À man-yer…à man-yer…C’était sa première contribution vocale le matin.

Alors le matin, tiens, parlons-en. À Paris, en période d’activité normale, mademoiselle A s’éveille comme une fleur autour de 7h. Là elle s’était programmée pour réclamer sa pitance (pour mémoire : À man-yer…à man-yer…) autour de 6h, histoire de profiter à fond des vacances. Et c’est vrai que dans cette petite commune du sud-est de la France, y avait des tonnes de trucs à faire à l’heure où même les insomniaques dorment. Mais au moins vous profitez de la fraîcheur. Ben oui, sacrée consolation dis donc. Mademoiselle A est à l’âge où elle ne peut pas encore vraiment s’occuper seule (non parce qu’à un moment ça advient quand même ? rassure-moi) et où, surtout, on ne peut pas la laisser sans surveillance. Vigilance est le maître mot. Attentifs ensemble, avec toi dans le rôle du méchant flic (pas les mains dans la poubelle, pas les chaussures sur le lit, pas les doigts dans la prise, pas d’acrobaties sur le balcon…) et elle dans le rôle du sauvageon (ah ouais ok, puisque c’est comme ça, je vide toutes les étagères de la bibliothèque, je claque les portes des placards jusqu’à ce que mort s’ensuive, je bois l’eau de mon bain y compris quand j’ai pissé dedans). Tu as l’impression d’être Big Brother, mais d’où t’es son frère ? d’où ? toi t’es sa mère on t’a dit. Les joies du dressage. Ou comment tu dis déjà ? Ouais, de l’éducation.

Oh bien sûr il y a ces moments magnifiques d’émotions partagées, d’amour et de communion, bien sûr, je ne peux pas le nier, juste je cherche un exemple. Ah ben tiens, par exemple à midi, quand tout le monde a faim et qu’on chante en chœur À man-yer…à man-yer...Quelle expérience inoubliable ! Se lever tôt, très tôt. Avoir envie de tuer tout le monde ou de mourir (selon que tu te sens pas trop bien ou très mal), ou au moins de disparaître dans une dimension parallèle où il n’y aurait pas d’enfants, pas de famille, pas d’êtres humains, un monde civilisé quoi merde. Se dire que c’est les vacances et qu’on est bien plus fatigué que quand on bosse.

Autant te dire que je suis hyper contente que ce soit la rentrée. 

mercredi 19 septembre 2012

♫ Des eaux troubles soudain troublent mes sens ♫

Dans la série Vie parallèle des hommes illustres, vous trouverez ci-dessous le compte-rendu, partiellement rédigé à chaud, des deux soirées annoncées dans l’article précédent.

Soirée avec l'homme-au-nyme

L’homme-au-nyme arrive vers 21h. Je l’attends en écoutant de la musique sur le canapé. Il dépose un léger baiser sur ma bouche, exactement comme quand nous nous voyions tous les jours. Je ne lui en veux pas pour son coup de colère un peu ingrat, je ne l’aime pas assez pour être touchée par nos différends. Nous reprenons donc les choses où nous les avons laissées. Nous échangeons les dernières nouvelles, qui tournent beaucoup autour des enfants, y compris celui que - grâce soit rendue à la médecine - nous n’avons pas eu ensemble. Tu es belle, tu sens bon, elle te va bien cette robe, dit-il. Nous fumons (et c’est érotisant). Nous baisons (beaucoup et bien, malgré l’IVG en cours, car même la sodomie, avec lui, est réussie). Il ne dort pas à la maison. Il occupera mon appartement pendant que je serai en vacances. Nous ne nous verrons pas pendant un mois.

Soirée avec E.

Je suis encore dans ces états cotonneux, proches des cieux (et notamment le septième) que tu vois du hublot, blancs et neigeux, enveloppants et moelleux. Je m'y vautre mentalement. S. est arrivé le premier, baguette et saucisson hallal sous un bras, punch maison sous l'autre (n'en déduis rien, S. est juif). E. fait une arrivée plus tardive, avec son vélo que nous montons dans l'appartement car il a oublié l'antivol. Nous croisons au bas de l'escalier de service les dealers qui tiennent les murs et qui connaissent bien l'homme-au-nyme (je ne doute pas un instant que celui-ci sera dûment informé par Radio Trottoir des visites que je reçois). J'ai sorti l'ordinateur dans le jardin pour l'ambiance musicale, il fait doux. Quand la voisine, vers minuit, nous demande de baisser un peu la voix, nous rentrons dans le salon, S. dans le rocking-chair, E. et moi sur le canapé. S. feuillette un livre sur l'orgasme féminin, je lis à E. quelques lignes de Pénélope au bain pour lui montrer que les lectures pour la jeunesse sonnent parfois très érotique, avec du chocolat fondu et de la mousse. La petite coquine est toute contente, lui sussurè-je (non !!??! s’exclame-t-il). E. prend en main la souris pour le traditionnel blind-test, S. fait des aller-retour entre lui et moi, qui finalement m'allonge sur le lit. 5h du matin, je me félicite d'avoir laissé entendre à mon chef que je risquais d'être absente le lendemain. E. vient s'étendre près de moi, il examine mes livres de chevet, je me serre un peu contre lui. Rideau de courte durée durant lequel S. s'éclipse.

(SMS du Jeudi 2 août 11h11 Tuilage parfait, je suis parti sur la pointe des pieds (vous dormiez), bonnes vacances pleines de chouilles improvisées, bises)

J'entends claquer la porte, je me lève pour fermer les volets, brosser mes dents et ôter mon pantalon. E. pose sa main sur moi.

E. : C'est ta cuisse ?
Ada : Oui mais dis-moi, tu m'inquiètes, tu hésitais avec quoi d'autre ?
E. : C'est juste que je la trouve très tonique.

Contrairement aux fois précédentes, nous avons pris le temps de dormir un peu (une heure à tout casser, mais tout de même) et nous sommes pleinement conscients de nos actes. La séance de caresses est très longue (d'autant que l'IVG en cours interdit l'option pénétration) (y compris sodomie, toi je sais pas, mais moi comme ça de but en blanc...) (et avec l'homme-au-nyme alors ? tu me diras) (et je te répondrai Ouais ben c'est pas pareil d'abord) (conclusion : toujours zéro pénétration avec E.), il n'oublie aucun centimètre carré de ma peau et pour la première fois nous nous embrassons. Il éjacule sur mes fesses. Nous prenons un petit déjeuner dans le jardin avant de nous souhaiter de bonnes vacances. Nous ne nous verrons pas pendant un mois.