jeudi 2 novembre 2006

La route est longue de Madison à je sais pas où

Tout est question de volonté, trop simple la vie.

Tu vas finir par croire que je radote (et pourquoi pas ? j'ai 83 ans, c'est de mon âge) mais c'est juste pour contextualiser. Y a eu une inondation sur mon lieu de travail, les ascenseurs sont hors service, c'est le bordel. Néanmoins, comme il faut toujours extraire (en première pression à froid c'est mieux mais tu fais comme tu le sens) le positif des pires situations, ça n'a pas que des inconvénients. Par exemple on a tous des cuisses en béton et le fessier bien ajusté. Moi qui pratique peu ce qu'on appelle le sport, je trouve ça pas mal.

D'autant que, autre exemple bien plus intéressant de mon point de vue, les circonstances font que nos amis les pompiers qui résident sur le site et qu'on rencontre rarement, si ce n'est à la cantine, tu sais la grande tablée de gaillards ? ceux qui garnissent leurs plateaux comme la bonne ménagère son caddie le samedi histoire de contenter sa gloutonne et nombreuse famille...

Nos amis les pompiers donc. Oui nos amis. Faisons preuve de bienveillance envers ceux qui peut-être un jour nous sauverons la vie, c'est la leçon que je reçus un matin, avant de gravir une montagne, de la part d'un sage antillais qui me parla ainsi : dis bien bonjour à tout le monde sur la route, on sait jamais, tu peux avoir besoin de quelqu'un...Sauf qu'il le disait à moitié en créole...

Nos très chers amis les pompiers circulent à droite à gauche en rondes permanentes et vérifications de précaution, notamment à mon étage. C'est pas désagréable. L'attrait de l'uniforme, t'oublies, je suis pas comme ça. Mais bon, les exigences du métier étant ce qu'elles sont, faut bien reconnaître qu'ils sont bien foutus d'un peu tous les côtés. Et encore on voit pas tout. Tout ça pour dire que je résiste pour ne pas aller faire un tour, disons avec le blond aux yeux verts, celui qui déroule sous mes yeux un énorme tuyau en me susurrant je vous arrose ? Bon je t'accorde que c'est pas très fin mais ça a le mérite d'être explicite...un petit tour vite fait bien fait, hop hop, dans le QG VIP (si t'as ce tirage au scrabble, tu pleures et je compatis) où y a de la moquette épaisse et tout le confort moderne.

Mais c'est pas tout. L'autre soir je prends le RER avec le charmant charmeur chilien occupé à envoyer une flopée de SMS. Mon regard erre dans le wagon et je note 1) que le jeune homme en face est fort joli, 2) qu'il me regarde. Bon. Je baisse les yeux, comme tout le monde. J'observe ailleurs. Mais irrésistiblement mes yeux reviennent à lui, qui n'a pas dévié. Son regard se fait plus expressif, tu sais comme quand tu souris sans bouger les lèvres. Il me détaille sans vergogne. Bizarre de se sentir objet. Mais oh, objet de convoitise quand même, toujours flatteur. Et puis nos attraits sont réciproques, c'est pas pareil, on est deux à se rincer l'oeil...

Le charmant s'interroge : je lui dis Réaumur ou les Halles ? Dis-lui les deux, il verra ce qui est le mieux pour lui. Le charmant replonge dans son portable. Le jeune homme en face a toujours les yeux plantés sur moi. Station les Halles. On arrive devant les portes au même moment. Je fixe le bouton. Il appuie dessus de deux doigts longs et souples. Je lève la tête et pour clore cet instant partagé je lui dis bonsoir en souriant. Dans la cohue de la sortie, le charmant emprunte un escalier, je mets deux secondes à me rendre compte que je pars dans l'autre sens (ah l'inconscient, l'inconscient...), le temps de voir le jeune homme se retourner une dernière fois.

Un monde, celui des possibles, se ferme. Si j'avais été "célibataire", je te prie de croire que ça se serait pas terminé comme ça, enfin je crois. Je ne succombe pas à la tentation (qui a dit jusqu'à quand ? parce que j'ai rien entendu là). Je résiste oui. Et je m'en félicite. Sous vos applaudissements.

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