jeudi 24 mai 2012

♫ Half of it is innocent, the other half is wise ♫

Appelons-le l'homme-au-nyme car nous portons le même prénom (ce qui donne des choses cocasses par SMS :  Salut Ada, c'est Ada) (ben si, c'est vachement cocasse attends). Il porte très exactement trois prénoms (je ne sais pas selon quels critères il se présente plutôt sous l'un ou l'autre), il préfère que je l'appelle par celui que nous avons en commun (car c'est cocasse tu vois bien, je suis pas la seule à le dire) ou du moins son diminutif. Bref. Lui m'appelle p'tite fleur, bébé, p'tit bout, mon amour, chou, ma chérie d'amour, et Ada aussi un peu.

Il mesure 1m80, est d'origine ivoirienne, séparé depuis deux ans de la mère de ses deux filles, a 40 ans, la peau noire et très douce, un corps magnifique, un phrasé sensuel. Il fait preuve d'une habileté certaine en matière de sexe.

Comme tu as pu le lire ici, nous nous sommes rencontrés sur la piste de danse, un lieu où il ne paye pas ses coups (pour services rendus) mais qu'il ne fréquente plus que très rarement. Il traverse une période qu'on pourrait qualifier de galère (licenciement certes négocié mais entraînant une colocation forcée). Pour arrondir les angles, il deale, je sais quoi mais pas en quelle quantité (je dirais petite). Il a un téléphone mais ni forfait ni crédit.

Samedi je l'invite à me rejoindre en deuxième partie de soirée dans un bar de Ménilmontant pour un anniversaire entre amis. Nous nous éclipsons assez rapidement chez moi.

Depuis la séparation avec le père de mademoiselle A, j'ai baisé avec 6 hommes nouveaux + 2 amants plus anciens. Chacun a sa façon de faire des petits compliments, je te livre ici le top 3 des remarques courtoises : en tête Tu as la peau douce, ce que je vais finir par croire car ils sont unanimes, suivi de Tu sens bon, puis, plus surprenant, Tu es propre. Et là je ne sais pas...je m'interroge...ont-ils rencontré tant de filles négligées qu'il vaille la peine de noter le contraire ? Moi je n'ai pas le souvenir d'une rencontre gâchée par l'hygiène douteuse du partenaire. Peut-être propre signifie-t-il autre chose ? mais quoi ? Non vraiment je ne vois pas.

L'homme-au-nyme dit qu'il se sent bien avec moi, que je le mets à l'aise, qu'il n'a pas besoin d'être un autre et qu'il a peur que je ne veuille plus le voir, il me regarde pendant que je m'active autour de la table basse. J'y dépose du thé, du miel, du citron (j'ai mal à la gorge), je pousse le billet de 20 euros qui a servi de paille dans la nuit très peu blanche finalement (une toute petite trace prélevée sur ce dont il m'a fait cadeau, lui-même n'en consomme plus), j'ajoute une baguette tradition rescapée de la veille, du beurre, de la confiture aux fruits de la passion ramenée de Martinique, un couteau, des petites cuillères, des biscuits fourrés à la fraise. C'est la première fois depuis la séparation avec le père de mademoiselle A que je propose un petit déjeuner après une nuit de baise entrecoupée de courts moments de sommeil. Il me rejoint sur le canapé, me parle de ses lectures, on mange, on rit à nouveau pour toutes sortes de bêtises, on retourne au lit. Il se lève vers 15h, prend une douche, me demande s'il peut utiliser mes crèmes, bien sûr, s'il me reste des clopes et s'il peut m'en taxer, bien sûr, je lui donne un paquet non entamé, je reste au lit et comate pendant qu'il vaque et s'en va.

Puis je me lève et tout bascule.

16h29 Dis homme-au-nyme, y avait un billet de 20 euros sur la table quand t'as rangé, si c'est toi qui l'a pris, je trouve ça vraiment pas cool

Je me suis levée, j'ai constaté qu'il avait débarrassé le petit déj, nickel chrome, les objets et denrées sont un peu en vrac dans la cuisine mais il a remis le beurre au frais, la table basse est toute propre. Juste il manque 20 euros. J'ai regardé autour, par terre, sur les bibliothèques, la grande table, pensant qu'il l'a déplacé pour passer un coup d'éponge, ou qu'il l'a fait tomber sans faire attention. Je ne le trouve pas. Je ne veux pas y croire et en même temps je n'ai pas d'autre choix, moins je le trouve et plus je me dis Mais arrête de chercher, tu le trouveras pas, qu'est-ce que tu crois. Je me sens trahie, je me refais le film, ses galères de tunes, le deal, tout ce contexte apparent. J'envoie le SMS, je me remets au lit, amère. Je me dis Fais chier quoi, il me plaisait bien. Amère et déçue. Mais fatiguée. Je m'endors.

Je suis tirée de mon sommeil par une voix qui appelle : Ada ! Ada ! Ce n'est pas dans mes rêves, c'est lui, sous ma fenêtre, il n'a pas le code, il est revenu, il ne partira pas tant qu'on n'aura pas retrouvé ce billet, il était où ce billet d'abord ? parce que lui il a pris du sopalin, le rouleau qui était là tu vois, 3 feuilles j'ai pris et j'ai mis dedans tout ce qui traînait, les miettes, les capotes, y en avait partout des capotes, là et même sous la table, près du lit, et jusque là aussi, et je sais que tout à l'heure y a le père de ta fille qui va arriver avec elle, alors voilà je voulais ranger, et tiens, je te rends ton paquet de clopes, je ne peux plus le garder maintenant, et je vais fouiller dans la poubelle puisqu'il n'est nulle part ce billet, je vais mettre mes mains dans la poubelle, regarde.

Il en ressort le billet toujours roulé en paille et c'est moi qui ai l'air d'une pauvre conne, je suis vraiment désolée, excuse-moi, j'ai pensé à tout sauf à la poubelle. Putain je suis en nage, il dit, il fait trop chaud dehors, dès que j'ai vu ton SMS j'ai fait demi-tour, je suis revenu, c'était pas possible, tu m'as trop mis en nage. Il enlève son tee-shirt, il est très beau torse nu, il me serre dans ses bras. Mais je ne peux pas me détendre comme ça moi, ça va trop vite, je passe de l'innocente abusée à l'imbécile aux préjugés, j'ai honte de moi, je me déteste, je m'en veux. Moi je ne t'en veux pas, il dit, et c'est bien que tu m'aies envoyé le SMS tout de suite plutôt que d'attendre et de ruminer, c'est de ma faute de toute façon, j'ai mis ta tune à la poubelle faut le faire quand même (il rit), je ne t'en veux pas du tout, c'est bon, c'est fini (il ne rit plus, il me regarde, il baisse la voix), viens maintenant j'ai encore envie de toi.

4 commentaires:

Cristophe a dit…

Fort risqué ce stratagème de mettre le billet à la poubelle. Je n'y aurai pas pensé. d:-)

Anonyme a dit…

Il a l'air bien, cet homme-au-nyme, je trouve. Il me plaît assez. Je ne sais pas pourquoi, je ne le connais évidemment pas, et ne sais rien de lui, sinon ce qu'en dit cette note. L'instinct, sûrement, l'instinct.

Nononyme

Anonyme a dit…

C'est courageux d'oser affronter un amant voleur, chapeau bas Ada
Tu l'as conquis, enfin à ce que je lis, l'été sera beau, l'été sera chaud. Massinissa

Ada a dit…

Cristophe, j'avoue ne pas avoir exclu immédiatement la possibilité du tour de magie.

Je crois, Nononyme, que c'est en effet quelqu'un de bien, pour cette réaction sans rancune déjà, mais sous bien d'autres aspects aussi.

Te revoilà Massinissa !
Merci pour le compliment, mais je dois à la vérité de dire que je n'ai pas réellement songé aux conséquences éventuelles en envoyant le SMS.