jeudi 16 décembre 2010

♫ Au diable les maîtresses queux qui attachent les coeurs aux queues des casseroles ♫

Maintenant que j'ai tout mon temps je peux me permettre de réfléchir. Parce que figure-toi que je suis en arrêt de travail pour une durée relativement longue. Un mois. Oui alors dit comme ça c'est flippant. Moi-même au début j'en menais pas large. Rester allongée à mi-temps pour que l'occupant à titre gratuit veuille bien passer l'hiver au chaud avant de pointer le bout de son nez, c'est sûr ça inquiète. Au final on s'habitue vite à se faire servir comme une princesse. Plus de ménage, plus de courses, plus de travail. Bon ben qu'est-ce que tu veux, je glande sous la couette et je regarde la neige tomber...et puis je lis environ un livre par jour...et je vais au cinéma, et au resto tant qu'à faire. Non franchement on va pas se plaindre hein.

Alors du coup je réfléchis. Aux couples. Je sais pas toi mais moi la plupart des gens de mon entourage sont en couple. Avec ou sans enfant mais avec cohabitation. Monamour et moi dans le souci de préserver la fougue des premiers temps, on a envisagé de vivre séparément pour mieux se retrouver quand et seulement si on en avait envie. Choisir plutôt que subir tu vois. Mais n'oublions pas qu'en bons petits bourgeois on aime son confort et que le trois-pièces parisien tu peux difficilement te l'offrir tout seul (bourgeois oui mais petit on t'a dit). En plus quand même on se kiffe. Et puis on parvient plutôt bien à se laisser vivre en toute liberté sans emmerder l'autre. Parfois on prend des vacances séparément et la plupart du temps on est très content d'être ensemble.

Oui bon rien d'exceptionnel tu me diras. Mais là où ça devient intéressant, c'est l'opinion de l'entourage. Larvée l'opinion, tu te doutes que c'est pas le genre d'idées qu'on affiche honnêtement. Mais qui, parmi les gens qui nous connaissent, qui, je te le demande, aurait misé le moindre centime d'euro sur notre relation et son heureuse évolution ? T'auras beau chercher...A la décharge de ces braves gens, précisons que les rebondissements, séparations et renversements de situation n'ont pas manqué, ce blog s'en est nourri. Cependant je te prie de croire qu'on a dû fournir, surtout dans les périodes critiques, un bon sujet de cancans et commérages lors de soirées où nous étions absents. Je les vois d'ici. Ben oui évidemment, vu que j'y participe. Pas à mon propre bitchage, je suis pas folle non plus, mais tu sais bien, seuls les plus grands peuvent se targuer de résister à la tentation de dire du mal d'autrui en son absence, c'est tellement fédérateur de s'entendre sur la connerie d'un tiers.

D'autre part je me faisais la réflexion que les conjoints de mes amis je les aime pas des masses en général. Je les trouve ternes, voire chiants ou pas à la hauteur, moches, pas assez cultivés, peu intéressants (oui ben je me lâche) (mais rassure-toi je t'ai fait un panorama, c'est pas la même personne qui cumule) (en même temps les qualificatifs ne sont pas exclusifs hein, on peut très bien être moche et chiant). Surtout je constate que lesdits amis n'en sortent pas grandis, que leur relation amoureuse a même plutôt tendance à les appauvrir et délaver les couleurs si chatoyantes que j'apprécie chez eux. A l'analyse il se pourrait que je sois jalouse, je veux bien prendre ma part de responsabilité. D'autant que ça devient difficile des les voir en solo, comme au bon vieux temps quoi, entre célibataires sans obligation. Sans compter qu'il est de bon ton d'apprécier le conjoint et d'être pote avec lui. Au point qu'on en arrive à fixer des dates où Machin(e) pourra se libérer pour cet apéro que tu espérais tellement passer en tête à tête avec cette personne dont la relation privilégiée et amicale est bien antérieure à sa rencontre avec un substitut de sa mère ou de son père (je me lâche complètement, oui). Et, alors que tu as envie de hurler "Mais t'aurais pas pu laisser ton boulet à la maison !", te voilà obligée de faire bonne figure. Bien sûr je caricature légèrement mais tu auras remarqué que l'ami(e) n'est pas la même personne selon que sa moitié de couple est présente ou non. Après il y a des nuances, des gradations dans la métamorphose, entre celui qui ne change pas d'un iota et celui qui se transforme en inconnu dès lors qu'il est accompagné (et un inconnu avec qui t'as pas vraiment envie de faire connaissance). Dieu sait que j'ai pu faire partie de cette dernière catégorie à certains moments détestables de ma vie passée. Mais j'ai l'impression que ce n'est plus le cas aujourd'hui et ça me désole de le constater chez les autres.

Un autre sport largement pratiqué consiste à dénigrer son propre conjoint. Ne nie pas, on le fait tous. Tu sais, quand il t'a bien énervé et que tu déblatères en énumérant sans reprendre ton souffle tous ses défauts et les griefs y afférents. Je suis d'accord, ça soulage et ça mange pas trop de pain, pour peu que tu te livres à cette gymnastique dans l'intimité d'une oreille amicale, bienveillante et qui abonde dans ton sens avec mesure et surtout sans renchérir, car tu n'aimes pas non plus qu'on dise du mal de ton chéri, toi t'as le droit mais y a des limites. Cependant quand l'ami en question (et crois-moi que j'ai plusieurs exemples en tête, ce qui est plutôt inquiétant) passe son temps à t'expliquer sans relâche, encore et encore, combien sa vie de couple est un enfer, non seulement c'est d'un mortel ennui mais tu ne peux même pas lui dire que tu en es toi-même convaincue et qu'il faudrait songer à y mettre un terme, car au final, qui es-tu pour donner des leçons ? , toi qu'on a pu trouver si mal assortie avec ta moitié et vice-versa...et que sais-tu de ce qui lie les gens ? Ok, pas grand chose. Disons que ça ne me regarde pas. Mais on m'ôtera pas de l'idée que conjoint dans certains cas ça s'écrit en deux mots, n'en déplaise aux pièces attachées.

lundi 22 novembre 2010

♫ Tout corps vivant branché sur le secteur étant appelé à s'émouvoir ♫

J'aurais presque pu battre un record personnel si la pharyngite ne s'était pas manifestée avant la fin de l'année. Elle est apparue discrètement, une légère gêne à la déglutition sur le côté gauche de la gorge, pas de fièvre. Le genre de truc qu'en temps normal je traite par le mépris. Seulement voilà, comme on dit dans les émissions télé à suspense, je suis enceinte et il s'agit d'être un peu responsable. J'ai donc tapé sur les pages jaunes le nom de ma rue dans la rubrique "Médecin généraliste". Un seul résultat s'est affiché. Bon ben comme ça hein au moins c'est facile. Quand à la fin de la consultation je lui ai tendu le formulaire Cerfa numéro 12485*01, elle s'est exclamée Mais vous n'êtes jamais malade alors ! Je ne te le fais pas dire. Et j'ajoute que cette histoire de médecin traitant c'est complètement injuste et absurde. Parce que regarde : moi, depuis qu'il faut avoir un médecin traitant, je n'ai pas eu besoin d'aller chez le médecin. Par conséquent je ne peux pas avoir rempli le formulaire. Mais quand je suis tombée enceinte, je suis allée chez le gynéco, normal. Sauf que j'ai été moins remboursée vu que je n'avais pas suivi le parcours de soin homologué, ce qui n'aurait pas été le cas si j'étais allée (sans symptôme aucun, juste pour le fun administratif) chez un généraliste que j'aurais choisi comme traitant avant de passer par la case gynéco. Note bien qu'on me fait payer plus parce que je coûte moins cher en dépenses de santé. Bravo. Enfin bon tout ça c'est du passé car maintenant j'en ai un moi aussi de traitant.

Monamour, ça ne l'étonnerait pas que ce soit ma lecture du moment qui m'ait rendue malade. Au début je me suis dit qu'il exagérait de me prendre pour un être si sensiblement fragile. C'est vrai que Les bienveillantes c'est assez particulier mais de là à en faire une maladie ? Pourquoi pas remarque, avec tous ses traitements spéciaux...Quoi qu'il en soit j'ai eu droit à ma dose d'antibiotiques et je n'ai pas l'impression qu'une solution finale se profile pour mettre un terme à ces angines chroniques.

Il a pourtant bien fallu passer ce week-end en Normandie prévu de longue date. Dans la belle-famille, qui est belle, c'est vrai, et sympa, et tout et tout. Mais qui a passé son temps à s'adresser à mon ventre. Cette jeune femme porte son ventre très avant, a dit la pédiatre. Je suppose que c'était une façon plus diplomate de dire qu'il est gros pour l'état d'avancement des travaux. Oui ben j'y peux rien si l'occupant à titre gratuit a un grand fémur, signe paraît-il d'une taille au-dessus de la moyenne, je t'assure que c'est pas de mes origines asiates qu'il le tient. Bref la star c'était mon ventre, on se l'arrachait, tout le monde voulait en palper les contours, apposer ses mains (on ne m'a jamais autant caressée que ces dernières quarante-huit heures) et même lui parler. Ce qui fait que je ne voyais que des gens penchés en avant, à quatre pattes contre ce ventre et...euh sinon, si ça vous intéresse, enfin sans vous déranger hein, moi je m'appelle Ada et comment dire, je suis la personne autour quoi. Mais penses-tu, vas-y que je te colle ma bouche dessus en hurlant C'EST TA GRAND-TATIE GEORGETTE, COUCOU ! TU ES EN NORMANDIE CHEZ TA GRAND-TATIE GEORGETTE !

mardi 2 novembre 2010

♫ I was looking for a job and then I found a job ♫

Dans mon nouveau boulot je suis chargée, entre autres, de recruter des gens. Pour faire des vacations, genre petit job d'étudiant. Mais aussi pour des durées un peu plus longues, genre contrats aidés de galériens. Alors c'est sûr, on n'est pas à la recherche de la nouvelle star. Encore que, avec Pôle Emploi ça ratisse large. T'as beau préciser que t'es situé dans le quartier latin, tu reçois des CV de la cité phocéenne (autant te dire que l'abonnement TGV Méditerranée outrepassera largement ton maigre salaire).

Évidemment c'est assez stressant de se retrouver de l'autre côté de la barrière, pour moi qui n'ai connu jusqu'à présent que les oraux de concours en guise d'entretien d'embauche. Ça a aussi son petit côté jouissif, tu sais, même s'il faut faire bien gaffe de pas déraper. Par exemple ne pas s'attacher au physique, vu que de toute façon tu seras son chef et qu'en guise de tabou de l'inceste tu dois t'interdire toute forme de harcèlement. Mais aussi ne pas être trop dur, comme tout débutant dans le métier bien arc-bouté sur des principes que l'expérience n'a pas assouplis. D'autant que c'est quand même plutôt un boulot de merde qu'on leur propose. Oh y a pire c'est sûr, ils sont pas sur un chantier soumis aux intempéries, y a même une ambiance plutôt culture-recherche tu vois, mais bon ça reste de la manutention grosso modo.

Au début, quand j'étais en formation et donc plus observatrice qu'actrice de l'entretien, je leur posais surtout des questions sur la dernière partie du CV tu sais, loisirs, intérêts personnels. Ça les détendait et je passais pour la gentille. Non parce qu'en fait je suis pas gentille du tout. Notamment avec les fautes d'orthographe. Je veux bien faire semblant de croire que ce sont de simples coquilles, mais la relecture c'est pas pour les chiens et si ça ne tenait qu'à moi, ça dégagerait direct. Je veux dire on reçoit tellement de CV que ça pourrait être un critère de pré-sélection non ? Mais il paraît qu'il faut faire preuve d'un peu plus d'ouverture d'esprit. Mouais. Cela dit, je leur fais remarquer pendant l'entretien, pas tellement pour les mortifier mais pour qu'ils corrigent, tout simplement.

Je suis pas gentille non plus avec les gens en retard. Le gars qu'on attend trois bons quarts d'heure et qui ne prévient même pas par téléphone, c'est niet. On aura beau dire, on aura beau faire : il croyait que c'était au numéro 2 au lieu du numéro 5 (il attend une heure juste en face de son objectif, sans réaction, sans chercher à comprendre, excuse-moi j'appelle ça un neuneu), il ne connaît pas bien Paris (mais tu te renseignes, gars, ça fait trois jours que t'as rencart), il n'est en France que depuis six mois ( et donc ? il a pas encore bien intégré cette drôle de coutume qu'on appelle la ponctualité ?), je reste intransigeante, merci d'avoir essayé, ciao.

Et puis parfois...Quand je vois que déjà t'as repassé ton plus beau pantalon, t'as ciré tes pompes de mariage, tu fais le mec hyper motivé pour un smic horaire à temps partiel, ça se trouve tu joues même pas, t'es réellement hyper motivé parce que t'as rien d'autre en vue et t'es prêt à te taper deux heures de transport quotidien pour ça...Ou au contraire t'as l'air de sortir du lit là, t'as encore la marque de l'oreiller tellement t'as rien d'autre à foutre de tes journées, et cet entretien fallait bien le passer pour justifier une recherche active d'emploi, mais au final tu t'en contrefous, oh si bien sûr tu veux bien un boulot mais tu vas pas non plus faire genre tu kiffes, y a des limites quand même...Dans un cas comme dans l'autre, parfois j'ai envie de dire allez tiens on arrête cette mascarade, on te le file le boulot et on en parle plus.

Il y a aussi les moments où l'occupant de mes entrailles à titre gratuit (qui est pourtant déjà un être cher) se met à faire du trampoline et me contraint à un exercice de dissociation-concentration très intéressant, d'autant que je ne peux pas, pour des raisons d'égalité de traitement, écourter l'entretien et m'extasier sur les miracles de la nature, y compris, et crois bien que je le regrette, lorsqu'il décide de me piétiner la vessie.

samedi 2 octobre 2010

♫ Show me the way to the next whisky bar, oh don't ask why ♫

Vient un moment où ça commence à se voir que t'as le bide en expansion. Le problème c'est qu'au début ça fait plus bedaine d'alcoolo tendance abdo kro (c'est quand même un comble, pile au moment où tu es entrée en abstinence, merde alors) qu'épanouissement et féminité. Ce qui fait que non seulement personne ne te cède la place dans les transports en commun, mais personne non plus n'ose te demander si tu attends un heureux événement dans la crainte de passer pour un malotru, non je suis juste grosse du bide étant une réponse potentiellement très traumatisante j'imagine. Certes tu as les seins qui contrebalancent en partie, mais c'est sans compter sur les troubles du système pileux (ton poil disparaît de certaines zones pour proliférer sur d'autres totalement improbables) (et heureusement peu visibles). Du coup je me suis empressée d'informer mon chef de mon nouvel état afin de travailler une heure de moins quotidiennement, on va quand même pas se priver des rares avantages que ça procure. Quant aux inconvénients...

Je deviens une véritable pisseuse. T'imagines même pas. Il paraîtrait que la réorganisation interne se fait un peu au dépend de la vessie qui, se voyant toute comprimée, se rappelle à ton bon souvenir au moins une fois par nuit, mais en réalité plutôt deux, voire trois la chienne. C'est pire la journée où je bénéficie d'une autonomie d'environ trois quarts d'heure. Exemple : je sors du taff, je prends le métro pour rentrer chez moi. Me vient-il l'idée d'acheter, je sais pas moi, pas du fromage au lait cru, pas de la charcuterie, pas des fruits de mer, pas de l'alcool, pas des sushis, pas plein de trucs que la femme enceinte est censée éviter de consommer, enfin bon, mettons des yahourts et des pâtes (trop super), me vient-il l'idée folle de passer au supermarché du coin pour acquérir toutes ces bonnes choses, que je dois différer sa réalisation et passer au préalable par mes toilettes personnelles afin d'éviter de me pisser dessus lors d'une éventuelle attente aux caisses. Oui c'est très pratique.

Je ne te dirai pas que le corollaire c'est que la femme enceinte va très peu à la selle pour cause de constipation chronique car, en tant que princesse asiate de pur esprit, je ne suis pas concernée par ces trivialités.

Après tu as la catégorie des inclassables. Revenons-en à l'arrêt de l'alcool par exemple (non c'est pas obsession, pourquoi ?). A priori ça paraît plutôt pas mal, surtout si ça constituait ton loisir de plein air favori, c'est l'occasion de discipliner ton hygiène de vie. Oui mais bon, tes amis eux ils en ont rien à cirer de l'hygiène de vie et tu te rends vite compte à quel point c'est barbant de passer trois heures à boire l'apéro...Disons qu'à la longue tu finis avec une carafe d'eau, ce qui n'est pas hyper psychotrope pour se mettre au diapason de cette bande de pochtrons. Sans alcool la fête est plus molle, je te garantis.

Le truc chiant aussi, c'est les gens qui s'inquiètent pour toi, comme si t'avais une maladie grave. C'est gentil et attentionné bien sûr, mais putain lâchez-moi deux minutes, j'ai réussi à survivre jusque là, je crois que je vais continuer à gérer. Et là tu te rends compte que c'est pas tellement toi dont il s'agit, mais du locataire de tes entrailles, qu'il faut en prendre en soin et tout, genre j'espère que tu manges équilibré pour l'enfant (ouais ben va manger équilibré avec tous les trucs interdits et après on en reparle) ou encore, très récemment, je n'invente rien, tu devras acheter un berceau, il va quand même lui falloir un lit à ce petit. Sans déconner ? je pensais plutôt lui aménager une niche dans le jardin (ah oui dis, j'ai déménagé dans un trois pièces avec jardin, c'est pas trop la classe ?). J'te jure, on n'est pas aidé. Heureusement monamour n'a pas ce travers. Sa blague favorite c'est A priori il est de moi...Et l'autre jour, alors qu'on parlait des envies, mythiques ou réelles, va savoir, mais saugrenues des femmes enceintes, il a déclaré : J'espère que tu ne seras pas aussi conformiste. En gros ça signifie que si je suis prise d'une irrépressible envie de choucroute garnie au milieu de la nuit, faudra pas trop compter sur lui (par contre, le connaissant, si c'est un truc à base de fromage fondu, y aura moyen de négocier). Enfin bon, actuellement la seule envie irrépressible qui me taraude, je te le rappelle, c'est l'envie de pisser.

vendredi 27 août 2010

♫ It was only a lover's game, now we're trapped in the world of our dreams ♫

Résumé des épisodes précédents (viens on fait comme si ce blog racontait une histoire) : suite à un concours, je suis retournée à l'école en province, ne retrouvant la capitale et monamour que le week-end. Du coup, trois nuits par semaine c'était son corps contre mon corps et nos corps qui s'enchaînent. Ce fut une belle époque, avec pas mal de régressions estudiantines, de beuveries et, qui l'eut cru (pas moi), d'amitiés à feuillage persistant. Maintenant l'école est finie, les voyages en train aussi, retour à Paris avec un nouveau boulot. Plus intéressant, mieux doté en vacances et mieux payé. On dit aussi travailler moins pour gagner plus. Tant qu'à faire hein. Non parce que je vois pas trop en quoi c'est truc de ouf de travailler plus pour gagner plus. Ne parlons même pas de travailler plus pour gagner pareil, c'est franchement sans intérêt. On fait pas du bénévolat non plus. Alors que travailler moins pour gagner plus, là excuse-moi, c'est autrement post-moderne.

Si tu le veux bien, faisons donc, en cette période de rentrée, un petit check up.

Les champs pulmonaires sont homogènes. (Tu m'étonnes, j'ai arrêté de fumer). Le coeur a quatre cavités. (Tout bon coeur qui se respecte a quatre cavités, on ne le dit pas assez) L'activité cardiaque est présente et régulière. (Encore heureux, je te l'accorde)

Il n'existe pas d'anomalie des aires rénales, les deux reins sont visibles. (J'ai arrêté de boire aussi) (de l'alcool)

La tête a un aspect normal. Les quatre membres sont en place. L'estomac est en place. La paroi abdominale est régulière. La vessie est en place. (Oui ok, rien d'exceptionnel)

Mais attends.

Le fémur mesure 5 mm. (Hé si)

Conclusion : grossesse normalement évolutive pour l'âge, le bilan foetal précoce est normal ce jour.
Dans un bon vieux rap, on aurait plutôt dit : si tes organes sont dans la place, lève le doigt (ah ben non, au temps pour moi, tu n'as encore que des rayons) (mais je parle à qui là ?)

samedi 26 juin 2010

♫ Make up in the new blood and follow me to where the real fun is ♫

Mon blog n'a pas été renouvelé depuis très longtemps, a dit un jour K'er à Didi en fronçant les sourcils, je n'ai pas le temps de m'en occuper, tu ne peux pas imaginer la quantité de devoirs qui nous tombent dessus en troisième année, j'ai l'impression d'y passer ma vie.

On ne saurait mieux dire. Même si, à la vérité, je passe toujours plus de temps dans les bars qu'à bosser mon mémoire de fin d'études, il n'en reste pas moins que l'activité est intense, surtout au niveau des devoirs conjugaux y compris extra.

Si intense qu'on en est arrivé au point de rupture. Tu sais, quand t'es bien interconnecté avec ton partenaire et que par inadvertance, tu bouges comme ci ou comme ça, provoquant une réaction de type Aïe ! Allez avoue, ça t'es déjà arrivé, bien sûr que oui, ça arrive à tout le monde.

La citation est tirée d'un charmant roman de Huang Beijia, Comment j'ai apprivoisé ma mère. Il m'a tout de suite interpellée depuis le présentoir de la bibliothèque, car moi aussi je dois apprivoiser ma mère. Enfin, celle que j'ai à l'école. Oui on forme une grande famille dans cette école, on a tous une mère ou un père chargé de nous soutenir dans notre parcours scolaire. Avec la mienne on ne se comprend pas. Je suis sûre qu'on s'aime pourtant, au fond.

Quand il a hurlé Aïe ! donc en se retirant pour courir dans la salle de bain, j'ai suivi. Le préservatif était plein de sang. Pendant deux secondes j'ai fait genre je maîtrise, t'inquiète, c'est une déchirure du frein, c'est rien du tout. Déchirure du frein, mon cul oui, là ça saigne de l'intérieur...Et puis comme SOS médecins nous l'a conseillé, on est parti aux urgences.

Parce qu'au début c'était cordial tu vois avec ma mère. Elle trouvait que mon sujet était passionnant et que ça allait donner des trucs trop supers. Elle m'avait demandé de faire un calendrier, alors moi, pas complètement dingue non plus, j'avais casé toutes mes actions en juillet-août (remise du mémoire en septembre ? Fort bien, je commencerai donc à la dernière minute), histoire qu'elle puisse pas dire Oui mais dites donc, vous êtes en retard sur votre calendrier là hein, puisque le retard était prévu. Bref, ce calendrier, elle a dit ni oui ni non, donc c'était gagné je considère.

Les urgences, bon, tu sais que c'est pas funky hot. Mais quand t'es en descente de chemins de fer, je te laisse imaginer...Au bout d'une heure, ils le font pisser et ils annoncent cinq heures d'attente. Du coup, que fait-on, comme deux imbéciles heureux ? On va manger un steak tartare et on remet ça bien sûr, quels cons de défoncés je te jure.

Et puis y a eu l'histoire de la problématique. Ma mère y attache beaucoup d'importance à la problématique, ouh là, ça rigole pas. Moi, tu me connais, je suis de bonne volonté, plutôt ouverte, et si ça peut faire plaisir, pas de souci, en veux-tu en voilà de la problématique. Sauf que ma mère, c'est pas une femme facile, elle serait même plutôt chieuse du genre à te poser des problèmes.

Et puis à 5 du mat, après plein de chemins de fer et d'interconnexions, je rentre chez moi. Et puis l'après-midi au réveil je téléphone pour prendre des nouvelles. Dialogue. Moi : ça va ? Lui : je suis à l'hosto, ils m'opèrent demain, si ça rate je deviendrai impuissant.

Alors bon, ok, je veux bien que la vie c'est pas simple et qu'à ses yeux je me donne pas assez de mal, admettons. Tu sais ce que c'est une mère, ça veut toujours le meilleur pour son enfant.

Heureusement c'était une fausse alerte, la fissure interne est censée se ressouder d'elle-même pour peu que l'engin reste au repos un certain temps (un mois en fait. La misère, le monsieur se classant dans la catégorie des hyper-actifs).

Sauf que l'enfant au bout d'un moment, il en a marre qu'on trouve toujours quelque chose à redire. Même si la mère, pas complètement insensible, glisse par ci par là quelques douceurs approbatrices.

On l'a échappé belle t'as vu ? Soulagement général est une expression assez faible pour rendre compte de l'envol des angoisses et culpabilités. D'autant que la convalescence laisse entrevoir une issue très favorable : ça a l'air de tout bien fonctionner comme il faut.

Alors là je viens de lui envoyer un plan détaillé à ma mère. Grand 1, petit a et tout le bordel. J'attends une réaction et je préviens tout de suite : qu'elle fasse pas trop chier hein, sinon je lui casse les sous-parties.

mardi 4 mai 2010

♫ Quand tu me mords où ça dérange et tu m'attaches les bras, quand je fais sautiller sa frange, ses cris se tirent dans les graves ♫

Les scènes de sexe c'est plus facile à jouer qu'à écrire. T'as vite fait de te retrouver avec un paquet de didascalies et quasiment pas de texte. Ben si, réfléchis.

Sinon tu as la bonne vieille quoique ambiguë technique de l'ellipse. Tiens prends Zola par exemple. Oui oh je sais, très mauvais exemple, Zola ne s'étant pas particulièrement illustré dans le genre. Mais prends-le quand même, dans je ne sais plus trop lequel d'ailleurs, Nana ou La Curée, voire L'argent, bref. Ils sont au resto dans un salon privé et tu lis un truc aussi lapidaire que "il l'embrassa sur le canapé" Point à la ligne. "Après son départ, il se pencha à la fenêtre..." (en mieux hein, je suis mauvaise imitatrice). Alors qu'est-ce que tu fais avec cette phrase après l'avoir lue à tonamour ? Direct je lui dis Eh ben ça y est, il l'a baisée. Mais lui, monamour, il prend la chose très littéralement et il dit Non ?? tu crois ? tu crois vraiment qu'il l'a baisée ? C'est bien ça le problème avec ces auteurs qui se permettaient pas d'aller au fond des choses, on n'est jamais sûr à cent pour cent (mais quand même, à mon avis il l'a baisée).

Ou alors, tu as la technique de la description. Avec Djian t'es tranquille, le gars la joue on ne peut plus explicite. Et il fait ça bien en plus. Tu sais si ça se passe par devant ou par derrière, avec quels accessoires et tu as des indications assez précises sur le niveau et la circulation des fluides corporels.

Moi depuis cette tentative je n'ai pas creusé le sujet. En ce moment j'aimerais bien t'en raconter un peu plus, parce que tu sais peut-être pas mais monamour et moi cette année on ne se voit pas beaucoup, du fait que j'étudie en province (je prépare un guide des bars) alors qu'il vit à Paris, sans compter mon séjour à Alger, son séjour aux Antilles, etc etc. Enfin tu vois, quand on se retrouve dans le lit en même temps, c'est un peu la fête et j'aurais plein de choses à te raconter si j'étais plus douée en écriture de scène de sexe.

D'autant qu'on avait commencé gentiment : lui, en liaison téléphonique avec un metteur en scène (déjà c'est excitant non ?) et moi à mi-chemin de sa tête et de ses pieds (j'aime son caleçon blanc sur sa peau noire). Il réagissait assez favorablement mais je ne voulais pas non plus le déconcentrer totalement. Puis il m'embrassa sur le canapé.

Comme je m'éveillais d'un sommeil ouaté, il me demanda si j'avais faim.
Monamour : t'as pas un petit creux toi ?
Ada : si, si si...je me mettrais bien un petit quelque chose sans les dents et je me disais justement que tu voudrais peut-être combler mon petit creux ?

vendredi 30 avril 2010

"Heureux les simples d'esprit car le royaume des cieux leur appartient"

Quand on m'a invitée à la fête de circoncision de son neveu, j'ai tout de suite accepté. Dans le petit salon, les filles m'interrogeaient sur mon mari (eh oui, on m'avait décrétée mariée, pour pas choquer les vieilles ni donner le mauvais exemple aux jeunes). Je ne prétends pas être une lumière en histoire-géographie, loin de là. Et je sais bien que tout est question de point de vue. Figure-toi que ma cousine d'Amérique n'a jamais entendu parler du Sahara. Alors c'est pas parce que ma copine ne situait pas les Antilles que j'allais lui jeter la première pierre de l'Intifada.

En plus j'avais été préparée. Pendant qu'on faisait la vaisselle dans la cour (une bassine pour le décrassage, une bassine pour le savonnage, une bassine pour le rinçage, attention ça rigole pas parce que l'eau c'est pas si courant là-bas), une jeune fille hospitalière et soucieuse d'établir le contact avait entonné : ♫ et moi je suis tombé en esclavage ♫. J'avais poliment enchaîné : ♫ de ce sourire, de ce visage ♫. Elle avait achevé : ♫ et je lui dis Emmène-moi ♫. Après m'avoir expliqué à quel point elle aimait Pierre Bachelet, elle s'était enquis de mes origines. Le Viêt Nam ? réfléchissait-elle tout haut, ah oui Hiroshima. Non belle enfant, tu confonds (pense Hiroshima-Hirohito la prochaine fois) . Le Viêt Nam, te dis-je. Ah oui, le Viêt Nam, Gandhi bien sûr. Toujours pas non (essaye Gandhi-Gange peut-être). Le Viêt Nam bon sang, l'Indochine, la guerre d'indépendance, Ho Chi Minh, les Américains. Une colonie française, comme l'Algérie, ça ne te dit rien ?

Dans le petit salon donc, rebelote, avec les Antilles. Vous voyez Cuba ? eh ben par là quoi, les Antilles françaises, l'esclavage, tout ça. Ah. L'esclavage ça fait dresser l'oreille de ma copine.
Mais il est comment ton mari, physiquement ?
Noir.
Noir ?
Oui noir.
Mais noir noir ? (Toute ressemblance avec un sketch existant ou ayant existé est bien évidemment fortuite car à ce stade je commence à trouver ça moyennement drôle)
Oui oui, noir noir.
Noir ??? (main sur le coeur, souffle court). Noir ? mais il faut me prévenir que je me prépare psychologiquement quand il arrivera.
Lisant sur mon visage que je suis extrêmement choquée, elle change de sujet puis revient à la charge un peu plus tard : Tu sais, nous aussi on en a des noirs ici, c'est pas grave qu'il soit noir ton mari (Putain mais arrête, tu t'enfonces là), le Coran dit qu'on est tous des frères. Certes certes.

Pendant ce séjour, j'ai à plusieurs reprises été confrontée à ce genre de situation où tu as du mal à faire la part entre l'ignorance, l'écart culturel et la connerie. Autant sur le racisme, je ne lâchais pas ; autant sur la religion, ça m'a vite fatiguée. Lorsque mon accompagnateur, sur les hauteurs de Notre Dame d'Afrique affirmait, dogmatique, que nous descendons tous d'Adam et Eve, je n'ai pas contré son créationnisme par une théorie de l'évolution qui ne l'aurait de toute façon pas convaincu. A Tipaza, les tombes de la nécropole romaine paraissent petites pour des adultes et grandes pour des enfants. C'est normal, avant ils étaient plus petits. Ah ben non, dit la copine (pas la raciste hein, une autre), avant ils étaient plus grands. Non tu te trompes, l'homme est plus grand aujourd'hui. Mais non, c'est écrit, même dans la Bible, avant les hommes étaient des géants. Mais oui bien sûr, et bientôt tu vas me dire qu'ils vivaient mille ans aussi non ? Exactement, comme Mathusalem. Ok, l'homme rapetisse et perd en espérance de vie, allez viens on va voir la mer (le long des golfes un peu obscurantistes si tu veux mon avis).

Alors à la fête de la circoncision (on passe au grand salon, ça joue de la derbouka, ça commençe à danser et ça y va les youyous), je prends tout avec philosophie. Quand on me demande quelle est ma religion, je sens le truc mais je laisse venir. Comme on s'étonne avec pitié (pas de religion...quelle misère...comment tu t'occupes dans la vie alors ?), je souris. Je parle du bouddhisme de mes ancêtres et de mon athéisme. Le ton légèrement inquiet se veut convaincant, pour mon bien : ne pas croire en Dieu c'est le pire. Même juif c'est moins grave. L'Islam veut bien tolérer toutes les religions mais pas de Dieu du tout, c'est vraiment pas possible. On m'engueule, carrément : comment tu crois que t'es arrivée là ? et la nature ? les animaux ? tout ce qui est sur terre ? Si c'est pas Dieu qui a créé tout ça, c'est qui ? Et, clou du spectacle : Non mais t'as réfléchi cinq minutes ? Cette fois j'éclate de rire. On est tous l'imbécile heureux d'un autre et ce soir c'est mon tour ? Très bien je le note.

jeudi 25 mars 2010

♫ Des rastas éclatés c'est chaud dans le ghetto ♫

Eh ben dis donc, je sais pas ce qu'ils font à bouffer les voisins, mais ça sent bizarre, me disais-je. Mais j'étais prise par l'intrigue du bouquin et confortablement installée sur le lit de mon studio algérois. Trois pages plus tard, je me décide à aller leur dire que décidément, ils ont oublié une casserole sur le feu, le dîner va être raté (tu vois l'arrogance un peu, alors que question cuisine, enfin bref). Je relève la tête : ah ben ça se confirme, y a de la fumée dans l'appart...J'te jure, ce que les gens peuvent être distraits.

J'ouvre la porte, je ne vois plus rien. Ou plutôt si : un nuage de fumée noire, d'un bout à l'autre du couloir. Putain mais y a le feu ! J'enfile un jean et des tongs (erreur, tu verras), j'attrape mon sac et j'entame la descente. Oh je sais, je sais, quand y a le feu, faut se calfeutrer chez soi et attendre gentiment les pompiers. Mais j'aurais aimé t'y voir. Evidemment, pour arranger les choses, j'habite au septième étage. Je ne vois rien, la lumière de mon téléphone portable ne traverse pas l'écran noir, je ne vais pas pouvoir rester en apnée bien longtemps...La panique est à son comble, je n'arrive pas à localiser le feu, s'il me bloque la route je vais crever là, on est à Alger bordel, jamais les pompiers ne viendront me chercher. Ou trop tard. Les yeux qui pleurent, la gorge qui pique, combien d'escaliers descendus, au moins l'équivalent de ceux de la tour Eiffel, ça fait trois plombes que ça dure, suis-je déjà en enfer ? On dirait que ça se dégage, je reprends mon souffle, l'éphèbe qui joue au foot dans le couloir soir et matin, qui a graffité sur mon palier "Chinoise...je te déteste" suivi d'un petit coeur (comprenne qui pourra), m'attrape par le bras en disant Il ne faut pas rester là madame, je suis tellement contente de voir un être humain, je continue la descente, enfin la rue.

La nuit commence à tomber, des hommes vont et viennent avec de minuscules extincteurs, trois quarts d'heure s'écoulent avant que les pompiers ne s'activent. La rue est au spectacle. Sauvée, je suis sauvée, je suis miraculée, à qui dois-je dire merci, à quelle religion dois-je me convertir, ma vie, ma précieuse vie.

Bon alors autant te dire qu'une fois que tu es sauvé, le naturel revient au galop et tu te mets à penser aux 700 euros qui tu as laissé dans le studio, tu les imagines se consumer petit à petit, enflammer les fringues et toutes tes maigres affaires de voyageuse. Eh oui, si ça se trouve, il ne te reste rien d'autre que ce que tu as sur toi, c'est le moment de l'inventaire : tu as ton sac à main, bon, mais y a quoi dedans ? Une photocopie de ton passeport (l'original est dans la doublure de ton sac de voyage...), une carte bancaire, une clé USB, un téléphone, 1000 dinars. Question habillement : un jean, un tee-shirt, des tongs et oh mon dieu, mon dieu, mon dieu, je crois que je vais redevenir athée...j'ai enfilé des tongs alors que j'étais en chaussettes...Rien ne me sera donc épargné.

Au pied de l'immeuble, des groupes se sont formés, les femmes plutôt d'un côté, les hommes plutôt de l'autre. Mais à circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles, les groupes ne sont pas totalement étanches. C'est l'immeuble Yacoubian ici ! Tout ceux avec qui je discute me disent : j'habite au troisième, j'habite au quatrième, j'habite la porte à gauche, et si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous êtes la bienvenue. Deux heures passent, on croit savoir que le feu a pris dans la cage d'ascenseur désaffectée et que ça a fait cheminée. Un quinquagénaire m'offre une clope, mi-sérieux, mi-plaisantin. Je l'accepte avec reconnaissance, les vieilles, choquées, s'éloignent de plusieurs pas.

Enfin les pompiers donnent le feu vert. Les escaliers sont inondés (pratique en tongs), chacun s'apprête à constater les dégâts. Sur le palier du septième, l'éphèbe me dit Bonne nuit, je rentre.

Tout est intact, une légère odeur de fumée. C'est terminé, je me mets à trembler.

mardi 2 mars 2010

♫ I'm a Vietnamese in Alger ♫

Pas facile d'être une femme seule à Alger, et asiatique de surcroît. Tout le monde me mate dans la rue ! Et du monde, crois-moi qu'il y en a un sacré paquet ici. On frôle l'embouteillage piéton.

Je vais taffer à pied et les premières fois j'ai compté : sur un trajet d'environ 30 minutes, pas moins de 15 Ni hao ! et autres Chinoise, Chinoise ! voire Japonaise ! Oppressant parfois, au point qu'il te vient l'envie d'en saisir un par le col en hurlant : DEJA JE SUIS VIETNAMIENNE, GARS, ET ENSUITE EST-CE QUE JE TE CAUSE MOI ? EST-CE QUE JE TE REGARDE ? ALORS LACHE-MOI DEUX MINUTES TU VEUX ? Et deux minutes c'est en effet le laps de temps maximum avant que ne fuse un nouveau Ni hao ! Aaargh...

Cependant, il faut le noter, pas de regards hostiles ni d'attitudes de rejet. Bien au contraire, des commentaires plutôt agréables, du Ah pas mal...au Ravissante...Et même, allez j'avoue, la tentation d'engager la conversation avec un gosse beau ou l'autre...

Pas facile donc d'être une femme seule à Alger, mais j'y étais préparée, ça faisait partie du challenge. Ce à quoi je m'attendais moins, c'est l'accueil exceptionnel qu'on te réserve dès lors qu'a lieu une rencontre sans arrière-pensée sexuelle.

L'autre jour c'était Mouloud, la fête de la naissance du prophète (une sorte de Noël quoi). Invitée pour l'occasion chez une famille algérienne, j'ai eu l'honneur de partager avec elle la rechta, le plat traditionnel (une tuerie), avant qu'on ne s'installe sur le balcon, avec vue panoramique sur Alger by night, aux sons des pétards et aux couleurs des feux d'artifice sauvages. Pour finir, un peu de henné au creux de la main pour la baraka !

Et des gens aux petits soins, qui téléphonent juste pour s'assurer que tu as de quoi manger, qui te couvrent de cadeaux alors que leur salaire est dix fois inférieur au tien, qui ont une curiosité d'autrui et une soif d'échange. Sans compter qu'ici c'est presque l'été. Enfin tu vois je kiffe !

Un voeu pieux toutefois : que le muezzin à 6 du mat la mette en sourdine, merci.

jeudi 21 janvier 2010

Y a des limites à ne pas respecter

Qu'est-ce que c'est bon je me disais, campée dans mes bottes, légèrement inclinée et les mains un peu glissantes, qu'est-ce que ça fait du bien. Je savourais le plaisir sensuel, le toucher mais aussi la vue, quand ça coulisse dans l'écume. J'avais oublié que ça pouvait être aussi puissant dans ces ambiances particulières et alcoolisées. Comme une résurgence de quelque chose que tu sais sans en avoir conscience. Par exemple l'autre jour quand j'ai reçu le mail Où ? Quand ?, sur le coup rien, et après je me suis dit Tiens ça pourrait être un genre d'Amélie Poulain (que j'aime pas d'ailleurs). Et là ça revenait, ça décuplait mes sensations. On était plusieurs, j'entendais les voix derrière, quelques rires et des soupirs, je jetais un oeil de temps en temps, avant de me recentrer sur mes priorités.

Tout avait commencé le plus classiquement du monde, dans un pub, avec du rock en fond sonore, on se pressait nombreux autour de deux petites tables. Au fil de la soirée on avait de plus en plus d'espace, jusqu'à ce qu'une table y suffise, il ne restait plus que nous, les guerriers de la nuit. Quand le barman a distribué les verres en plastique pour la fermeture, on a fini de boire dans la rue et y en a un, un des rares à avoir un appart où il est possible de recevoir autre chose que des coups de fil, y en a un qui a proposé : On peut aller chez moi si vous voulez. Nous étions tous d'accord.

On a failli en perdre une dans la salle de bain, finalement non. Le vin était tiré, on l'a bu. Bien sûr on a parlé de sexe et fatalement on s'est posé la question de l'opportunité de se livrer (Où ? Ici - Quand ? Maintenant - Hic et nunc) à des activités sexuelles collectives. Oui on s'est poliment posé la question. Pas longtemps.

Alors je me suis levée, j'ai dit un truc comme Je ne peux plus résister, je me lance. Et j'ai pas regretté. Car c'était tellement bon. Après c'était pas mal non plus, quand de nouveau nous étions attablés, autour de la casserole fumante et reconstituante. La satisfaction de l'oeuvre accomplie.

Car une fois qu'on a eu décliné l'offre badine de partouse, notre hôte a dit : Ben sinon je peux vous faire des pâtes. Il était 5h du mat, on n'avait pas dîné, on a tous dit Banco. En revanche, il a ajouté (car ici tout le monde parle trop bien t'as vu, ils disent ni des fois, ni par contre), en revanche y a plus de casserole propre. Alors j'ai fait la vaisselle et j'ai kiffé.